En France les mesures mises en place par le gouvernement pour faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de l'épidémie de Covid-19 ont pour but de maintenir l’emploi et d’éviter les licenciements.

En conséquence, toute rupture du contrat de travail risque en conséquence d’être jugée sévèrement par les juges en cas de contentieux, même si pendant cette période aucun texte n’interdit à l’employeur de rompre un contrat de travail par le biais d’une rupture conventionnelle, de considérer qu’une période d’essai n’est pas concluante, qu’un salarié est en insuffisance professionnelle ou que la situation économique ne permet plus de maintenir certains contrats de travail car des postes sont définitivement supprimés.

1/ La rupture d’une période d’essai   pendant la période du Covid ?

Aucun motif n’est requis pour rompre une période     d’essai et sauf disposition conventionnelle contraire le seul formalisme pour notifier cette rupture est de prouver que le salarié a bien été informé.

La période d’essai a pour objet d’évaluer la valeur professionnelle du salarié et la rupture ne pourra donc intervenir que si la période d’essai n’est pas concluante. Ainsi une rupture trop rapide n’ayant pas permis concrètement d’évaluer les compétences du salarié pourrait être qualifiée d’abusive et donner lieu au versement de dommages-intérêts à hauteur du préjudice subi par le salarié (impossibilité de s’inscrire à Pôle emploi et de retrouver un travail du fait de la situation actuelle) .

La rupture de la période d’essai ne peut donc avoir pour origine un motif économique lié par exemple à une sous-activité du fait de la crise sanitaire ; il est donc préférable dans ce cas de solliciter le chômage partiel et la période d’essai sera prolongée d’autant.

2/ La rupture d’un CDD pendant la période du Covid ?

Les motifs de rupture légitime du CDD sont extrêmement encadrés et si l’employeur doit rompre un CDD en cours d’exécution en raison de l’épidémie du Covid-19, il devra établir que cette pandémie est un cas de force majeure qui justifie la rupture du contrat de travail. Cependant en droit du travail les juges sont peu enclins à reconnaître la force majeure comme cause de rupture légitime (le virus Chikungunya et l’épidémie de Dengue n’avaient pas été qualifiés de force majeure...).

3/ Un licenciement pendant la période du Covid ?

Aucun texte légal n’interdit de licencier pour motif personnel, disciplinaire ou économique. Les règles demeurent les mêmes : le motif d’un licenciement quel qu’il soit doit donc avoir une cause réelle et sérieuse. Cependant au vu de la crise sanitaire actuelle le motif du licenciement doit être remis dans ce contexte exceptionnel lequel sera forcément pris en considération par le juge en cas de contentieux :

a) dans le cas d’un licenciement pour un droit de retrait qualifié d’abusif, le juge vérifiera que l’employeur a bien tout mis en œuvre pour assurer la sécurité et la santé physique et mentale du personnel (actions de prévention, d’information, de formation et mise en place d’une organisation et de moyens adaptés) : respect des règles de distanciation et des gestes barrière ; tenue des réunions réduites au strict nécessaire dans le respect des règles de distanciation ; annulation des déplacements ; marquage au sol, gel hydro alcoolique, masque, nettoyage des surfaces, mesures à prendre en cas d’infections signalées …

Les dernières ordonnances de référé rendues par les tribunaux judicaires à l’encontre d’Amazon et de La Poste obligent même l’entreprise à prendre en compte dans l’évaluation des risques, les risques psychosociaux liés à cette crise.

L’employeur devra rapporter la preuve qu’il a bien pris toutes ces mesures et dans le cas contraire le droit de retrait sera légitime et la responsabilité de l’employeur pourra être engagée.

b) dans le cas d’un licenciement pour négligences, insuffisance professionnelle, insuffisance de résultat, si le salarié est en télétravail, le juge tiendra compte des circonstances particulières liées à la situation de crise ; il est préférable dans ce cas de mettre en demeure le salarié de se ressaisir ou de lui notifier un avertissement au lieu de le licencier.

c) dans le cas d’un licenciement économique

Il faudra apporter la preuve que malgré toutes les aides mises en place par le gouvernement, la situation de l’entreprise s’avère irrémédiablement compromise, que le licenciement économique est inéluctable et que l’entreprise ne peut pas mettre en œuvre l’activité partielle. Le juge vérifiera aussi les actions mises en place (obligation de reclassement et de formation) afin d’éviter le licenciement économique.

Enfin pratiquement la procédure reste compliquée en raison de la pandémie :

- il faut pouvoir convoquer le salarié à un entretien de licenciement,

- pour la tenue de l’entretien : la visio conférence sera-t-elle admise ?

- il faut pouvoir notifier le licenciement au salarié…

4/ Une rupture conventionnelle pendant la période du Covid ?

Il faut réellement que le salarié soit demandeur car les modalités pratiques sont difficiles à mettre en œuvre :

- la tenue des entretiens ? en Visio Conférence ?

- la signature de la convention de rupture

- l’homologation par la DIRECCTE ?

- le risque d’un vice de consentement, le salarié peut invoquer l’état de violence morale ou économique dans lequel il se trouvait au moment de la signature du fait du contexte anxiogène lié au Covid.

En conclusion aucune disposition légale n’interdit les ruptures du contrat de travail pendant cette période de crise sanitaire mais les risques sont importants et il conviendra avant de s’engager dans de telles démarches de bien préparer son dossier en amont.