ACTUALITE DROIT SOCIAL

 

Jurisprudence

 

·       Contrat de travail

 Pour qu'une mutation intragroupe soit mise en place, une convention tri partite doit être signée entre le salariée et ses employeurs successifs organisant la poursuite du même contrat de travail (Cass. soc., 26 oct.2022, n° 21-10.495)

La reprise d'une clientèle et du savoir-faire particulier de la salariée indispensable à l'exercice de l'activité sont des indices de transfert d'une entité économique autonome (Cass. soc., 19 oct. 2022, n°21-19.828)

 

·       Durée du travail

Doivent être qualifiées de temps de travail effectif et non de temps d'astreinte les périodes de garde au cours desquelles les contraintes imposées au travailleur sont d'une nature telle qu'elles affectent objectivement et très significativement la faculté, de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres intérêts. A l'inverse, lorsque les contraintes imposées au travailleur au cours d'une période de garde déterminée n'atteignent pas un tel degré d'intensité et lui permettent de gérer son temps et de se consacrer à ses propres intérêts sans contraintes majeures, il s’agit de temps d’astreinte (Cass. soc., 26 octobre 2022, n° 21-14.178).

 

·       Rupture du contrat de travail

Est une violation de la liberté d'expression le licenciement, en partie, fondé sur le comportement critique du salarié et son refus d'accepter la politique de l'entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro » mais aussi l'incitation à divers excès (Cass. soc., 9 novembre 2022 n°21-15.208)

Le juge ne peut considérer que le transfert de 256 mails sur la messagerie personnelle du salarié quelques jours après sa convocation à entretien préalable justifie un licenciement sans rechercher si le salarié établissait que les documents en cause étaient strictement nécessaires à l'exercice des droits de sa défense dans le litige qui l'opposait à son employeur à l'occasion de son licenciement (Cass. soc., 9novembre 2022 n° 21-18.577)

Un salarié avait été licencié pour motif économique. La Cour d'Appel avait toutefois annulé le licenciement considérant qu'au moment de la notification du licenciement, l'employeur était informé de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle par le salarié et de ce que le médecin du travail était saisi par celui-ci en vue d'une reprise, et que, dès lors, au moment de la notification du licenciement pour motif économique, l'employeur disposait d'éléments suffisants lui permettant de retenir que l'état de santé du salarié pourrait faire l'objet d'une inaptitude en lien avec l'activité professionnelle de sorte que le véritable motif du licenciement était lié à l'état de santé du salarié.

La Cour de cassation censure ce raisonnement considérant que la Cour d'Appel aurait dû rechercher si la cessation d'activité de l'entreprise invoquée à l'appui du licenciement ne constituait pas la véritable cause du licenciement (Cass. soc., 26 oct. 2022, n°20-17.501)

Aux termes de l'article L1235-2-1 du code du travail, "En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l'un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d'examiner l'ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l'évaluation qu'il fait de l'indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des dispositions de l'article L. 1235-3-1".

Toutefois, cela suppose que l'employeur conteste à titre subsidiaire la somme réclamée par le salarié en conséquence de la nullité du licenciement (Cass. soc., 19 octobre 2022, n° 21-15.533)

Une Cour d'Appel avait considéré que la période de suspension du contrat de travail pour maladie devait être prise en compte dans le calcul de l'ancienneté du salarié pour la détermination du montant de l'indemnité de licenciement dès lors que l'arrêt était pour partie lié à des manquements de l'employeur et avait donc une origine professionnelle.

La Cour de cassation censure ce raisonnement : en l'absence de dispositions conventionnelles, les absences pour maladie n'ont pas à être prises en compte dans le calcul de l'ancienneté propre à déterminer le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement (Cass. soc., 28 sept. 2022, n°20-18.218)

 

·       Contentieux

Le juge ne peut pas écarter des pièces provenant de l'agenda électronique de la salariée disponible sur son ordinateur professionnel sans rechercher au préalable si elles avaient été identifiées comme étant personnelles (Cass. soc., 9 novembre 2022n° 20-18.922)

 

·       Rémunération

La CCN des entreprises de prévention et de sécurité prévoit le versement d'une prime annuelle de sûreté aéroportuaire au profit des salariés ayant au moins un an d'ancienneté et présents au 31 octobre de chaque année. La CCN ne précise pas ce qu'il faut entendre par présence.

En l'espèce le salarié avait été victime d'un accident du travail et son contrat de travail était suspendu de sorte que l'employeur avait considéré qu'il n'était pas effectivement présent au 31/10 et ne pouvait donc bénéficier de la prime.

La Cour de cassation considère à l'inverse que la condition de présence du salarié au 31 octobre de chaque année s'entend de la présence dans les effectifs de l'entreprise, au 31 octobre de chaque année, du salarié (Cass. soc., 26 octobre 2022, n° 21-15.963)

L'absence d'autorisation préalable de l'employeur à la réalisation d'heures supplémentaires n'exclue pas en soi son accord tacite (Cass. soc., 28 sept.2022, n° 21-13.496)

 

·       Relations collectives,

 Le tribunal judiciaire, qui a relevé que le syndicat avait présenté, en vue des élections partielles des membres du comité social et économique de la société, des listes incomplètes composées de quatre hommes et constaté que ces listes comportaient un homme en surnombre au regard de la proportion de femmes et d'hommes figurant dans le protocole d'accord préélectoral établi pour les élections initiales en a déduit à bon droit qu'il convenait d'annuler l'élection du dernier élu du sexe surreprésenté (Cass. soc. 9 novembre 2022 n° 21-60.183)

Le comité social et économique venant aux droits du comité d'entreprise ayant signé un accord de participation n'est pas recevable à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité d'une clause de l'accord (Cass. soc., 19 octobre 2022, n° 21-15.270 FSB)

La décision par laquelle le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui, dans le cadre d'une consultation sur un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité, a décidé du recours à une expertise, mandate un de ses membres pour agir et le représenter en justice pour garantir l'exécution de la décision de recourir à un expert constitue une délibération sur laquelle les membres élus du CHSCT doivent seuls se prononcer en tant que délégation du personnel, à l'exclusion du chef d'entreprise, président du comité (Cass. soc., 19 oct. 2022, n° 21-18.705)

 

L'inspecteur du travail est compétent, en l'absence d'accord collectif ou d'accord entre les comités sociaux et économiques membres du comité des activités sociales et culturelles interentreprises  (CASCI), pour déterminer le nombre de sièges de représentants des salariés au CASCI et leur répartition entre les représentants des salariés des entreprises intéressées et que sa décision peut faire l'objet d'un recours hiérarchique devant le ministre du travail.

Il appartient néanmoins à la juridiction judiciaire de connaître de la demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle l'inspecteur du travail a déterminé les modalités de l'élection des délégués d'un comité des activités sociales et culturelles interentreprises (Tribunal des Conflits, 10 oct. 2022, n° 4249)

Un salarié protégé avait été licencié sur autorisation de l'inspection du travail pour avoir prononcé à l'encontre de trois salariées, des propos "brutaux ou maladroits ", " déplacés et sexistes ", et présentant un caractère blessant pour leurs destinataires faisant explicitement référence, d'une part, au sexe de ces salariées et, d'autre part, à leur origine et à leur religion supposées.

La Cour Administrative d'Appel avait toutefois considéré qu'il existait des tensions entre le salarié protégé et l'employeur et que le salarié n'avait pas d'antécédents disciplinaires de sorte que ses propos ne constituaient pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.

Le Conseil d'Etat censure ce raisonnement et considère au contraire que de tels faits justifiaient le licenciement (Conseil d'État, 4ème - 1èrechambres réunies, 07 octobre 2022, n° 450492)

Un jugement ayant reconnu l'existence d'une UES mais non assorti de l'exécution provisoire et faisant l'objet d'un appel toujours pendant lors de l'engagement de la procédure de licenciement, c'est au seul niveau de la société employeur que devaient s'apprécier les conditions de mise en œuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi (Cass. soc., 28 sept.2022, n°21-19.092)

 

·        Harcèlement/discrimination

Des salariés transférés dans le cadre d'une application volontaire de l'articleL1224-1 avaient continué de percevoir une prime d'assiduité n'existant pas chez le nouvel employeur.

Les salariés de ce dernier avaient alors réclamé eux aussi le bénéfice de cette prime sur le fondement de l’égalité de traitement.

Pour la Cour de cassation, l'application volontaire de l'article L. 1224-1 permet demain tenir la prime d'assiduité au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement(Cass. soc., 28 sept. 2022, n°21-12.318)

 

·        Sécurité/Conditions de travail

 Le médecin du travail peut proposer des mesures individuellesd'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail ou desmesures d'aménagement du temps de travail justifiées par des considérationsrelatives notamment à l'âge ou à l'état de santé physique et mental dutravailleur.

Lorsque le médecin du travail, qui a précédemment proposé, dans l'attented'examens médicaux complémentaires, une mesure individuelle d'aménagement deposte, revient sur cette proposition après réalisation de ces examens, cettedécision est susceptible de contestation devant le Conseil de Prud'hommes.

En l'espèce, le médecin du travail avait établi une attestation de suivi comportant une interdiction de station debout prolongée et de port de charges supérieures à deux kilogrammes dans l'attente des examens complémentaires. Quelques semaines après il avait établi une nouvelle attestation de suivi levant toutes les restrictions. Pour la Cour de cassation, cette attestation constituait un avis susceptible de recours devant le conseil de prud'hommes (Cass. soc., 26 octobre 2022, n°21-17.484)

  

·        Charges sociales

Les jetons de présence alloués par l'assemblée générale des actionnaires aux administrateurs du conseil d'administration et aux membres du conseil de surveillance sont soumis au forfait social.

En l'espèce, des représentants élus du personnel salarié au conseil d'orientation et de surveillance avaient abandonné leurs jetons de présence au profit de leur organisation syndicale, celle-ci les percevant directement sans transiter par le compte bancaire des intéressés.

Pour la Cour de cassation, les jetons de présence avaient bien été alloués aux membres du conseil de surveillance en rémunération de leur activité, peu important qu'ils n'aient pas été effectivement perçus, et devaient donc être soumis au forfait social (Cass. 2e civ., 13 oct. 2022, n° 21-11.754)

 

Textes

BOSS, 10 octobre 2022, Instruction relative aux conditions d’exonération de la prime de partage de la valeur prévue par l’article 1 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat

Le décret n° 2022-1506 du 1er décembre 2022 met en œuvre la déduction forfaitaire des cotisations patronales sur les heures supplémentaires pour les entreprises d’au moins 20 et de moins de 250salariés.

Ainsi, le montant de la déduction forfaitaire des cotisations patronales prévue au I de l’article 2 de la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est fixé à 0,50 € par heure supplémentaire. Le décret s’applique aux cotisations et aux contributions sur les rémunérations dues au titre des périodes courant à compter du 1er octobre 2022.D. n°2022-1506, 1er déc. 2022 : JO 3 déc. 2022, texte n° 1

  

Mise en place par l'assurance maladie d'un outil en ligne pour remplir le document unique d'évaluation des risques

 

Questions–réponses de la CNIL sur la collecte des données personnelles dans le cadre des élections professionnelles

 

Questions-Réponses du ministère du travail sur le rachat de jours de repos

 

Charlotte Hammelrath

Ronan Le Balc’h

Avocats à la Cour

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